Poèmes d'automne

 

La chanson de Prévert

 

Chanson des escargots qui vont à l'enterrement ...

 

Odeur des pluies de mon enfance

L'automne dans mon arbre à palabres

Chanson des escargots qui vont à l'enterrement ...

 

À l'enterrement d'une feuille morte

Deux escargots s'en vont

Ils ont la coquille noire

Du crêpe autour des cornes

Ils s'en vont dans le noir

Un très beau soir d'automne

Hélas quand ils arrivent

C'est déjá le printemps

Les feuilles qui étaient mortes

Sont toutes ressuscitées

Et les deux escargots

Sont très désappointés

Mais voilà le soleil

Le soleil qui leur dit

Prenez prenez la peine

La peine de vous asseoir

Prenez un verre de bière

Si le coeur vous en dit

Prenez si ça vous plaît

L'autocar pour Paris

Il partira ce soir

Vous verrez du pays

Mais ne prenez pas le deuil

C'est moi qui vous le dis

Ça noircit le blanc de l'oeil

Et puis ça enlaidit

Les histoires de cercueils

C'est triste et pas joli

Reprenez vos couleurs

Les couleurs de la vie

Alors toutes les bêtes

Les arbres et les plantes

Se mettent à chanter

À chanter à tue-tête

La vraie chanson vivante

La chanson de l'été

Et tout le monde de boire

Tout le monde de trinquer

C'est un très joli soir

Un joli soir d'été

Et les deux escargots

S'en retournent chez eux

Ils s'en vont très émus

Ils s'en vont très heureux

Comme ils ont beaucoup bu

Ils titubent un p'tit peu

Mais là-haut dans le ciel

La lune veille sur eux.

 

Jacques Prévert ("Paroles" 1945)

 

 

Odeur des pluies de mon enfance

Derniers soleils de la saison !

A sept ans comme il faisait bon

Après d'ennuyeuses vacances,

Se retrouver dans la maison !

 

La vieille classe de mon père,

Pleine de guêpes écrasées,

Sentait l'encre, le bois, la craie

Et ces merveilleuses poussières

Amassées par tout un été.

 

O temps charmant des brumes douces,

Des gibiers, des longs vols d'oiseaux,

Le vent souffle sous le préau,

Mais je tiens entre paume et pouce

Une rouge pomme à couteau.

 

René-guy Cadou

 

La chanson de Prévert

 

Oh je voudrais tant que tu te souviennes

Cette chanson était la tienne

C'était ta préférée

Je crois qu'elle est de Prévert et Kosma

 

Et chaque fois les feuilles mortes

Te rappellent à mon souvenir

Jour après jour les amours mortes

N'en finissent pas de mourir

 

Avec d'autres bien sûr je m'abandonne

Mais leur chanson est monotone

Et peu à peu je m'indiffère

A cela il n'est rien a faire

 

Car chaque fois les feuilles mortes

Te rappellent à mon souvenir

Jour après jour les amours mortes

N'en finissent pas de mourir

 

Peut-on jamais savoir par où commence

Et quand finit l'indifférence

Passe l'automne vienne l'hiver

Et que la chanson de Prévert

 

Cette chanson Les Feuilles Mortes

S'efface de mon souvenir

Et ce jour là mes amours mortes

En auront fini de mourir

 

Jacques Prévert

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