"LES RONDETS DE CAROLE
D'origine française, issu d'un courant à la fois liturgique et folklorique, le
rondet est ainsi appelé parce qu'il s'agit d'une chanson destinée à la ronde, ou
d'une poésie cyclique. Le rondet perdit petit à petit son caractère
chorégraphique pour devenir avec Adam de la Halle et Guillaume de Machaut, le
rondeau musical, polyphonique à deux, trois ou quatre voix, puis aux XIV et XV°
siècles, le rondel, uniquement poétique (Charles d'Orléans, Christine de Pisan)
La " carole " était une danse, chaîne ouverte ou fermée, où les danseurs et
danseuses évoluaient au son des voix. A l'origine, la fonction des rondets de
carole était d'accompagner cette danse, ils étaient primitivement liés aux fêtes
de mai.
Il ne reste des rondets primitifs que quelques fragments dans des romans
courtois, ou dans des chansons, des motets, où ils ont été enchâssés en guise de
refrain.
MAIN SE LEVA BELE AELIZ
(anonyme)
Main se leva bele Aeliz.
Dormez, jalous, ge vos en pri !
Biau se para, miex se vesti
Desoz le raim.
Mignotement la voi venir
cele que j'aim.
Main se leva bele Aeliz ;
Mignotement la voi venir
Bien se para, miex se vesti
En Mai.
Dormez, jalous, et ge m'envoiserai
Main se levoit Aeliz,
J'ai non Emmelot !
Biau se para et vesti
Soz la roche Guion.
Cui lairai ge mes amors
Amie, s'a vos non ?
Main se leva la bien fete Aeliz ;
Par ci passe li bruns, li biaus Robins,
Biau se para et plus biau se vesti.
Marchiez la foille et ge qieudrai la flor ;
Par ci passe Robins li amourous,
Encor en est li herbages plus douz.
Aeliz main se leva.
Bon jor ait qui mon cuer a !
Biau se vesti et para
Desoz l'aunoi.
Bon jor ait qui mon cuer a !
N'est pas o moi.Au matin se leva belle Aélis.
Dormez, jaloux, je vous en prie !
Bien se para, mieux encor se vêtit
sous la ramure.
Toute gracieuse je vois venir
celle que j'aime.
Au matin se leva belle Aélis,
Toute gracieuse la vois venir.
Bien se para, mieux encor se vêtit
en mai.
Dormez, jaloux, moi, je m'amuserai.
Au matin se levait Aélis ;
J'ai nom Amelot.
Bien se para et bien se vêtit
sous la Roche-Guyon.
A qui donnerai-je mon amour,
Amie, sinon à vous ?
Au matin se leva belle Aélis,
Par là va Robin le brun, le joli.
Bien se para, mieux encor se vêtit.
Foulez la feuille, je cueillerai la fleur,
Par là va Robin le bel amoureux,
et l'herbe en est plus douce devenue.
C'est là-bas sous l'olivier
que Robin conduit sa mie.
L'eau de la source y sourd pure
sous l'olivette.
Ah, mon Dieu ! Robin conduit
belle Mariette."
Fut-il jamais douceur de coeur pareille
À voir Manon dans mes bras sommeiller ?
Son front coquet parfume l'oreiller ;
Dans son beau sein j'entends son coeur qui veille.
Un songe passe, et s'en vient l'égayer.
Ainsi s'endort une fleur d'églantier,
Dans son calice enfermant une abeille.
Moi, je la berce ; un plus charmant métier
Fut-il jamais ?
Mais le jour vient, et l'Aurore vermeille
Effeuille au vent son bouquet printanier.
Le peigne en main et la perle à l'oreille,
À son miroir Manon court m'oublier.
Hélas ! l'amour sans lendemain ni veille
Fut-il jamais ?
Alfred de MUSSET
Jeunes amoureux nouveaux,
En la nouvelle saison,
Par les rues, sans raison
Chevauchent faisant les sauts.
Et font saillir des carreaux
Le feu, comme de charbon :
Jeunes amoureux nouveaux
En la nouvelle saison.
Je ne sais si leurs travaux
Ils emploient bien ou non ;
Mais piqués de l'éperon
Sont autant que leurs chevaux,
Jeunes amoureux nouveaux.
Charles d'ORLÉANS